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Cetexte de Charles PĂ©guy, extrait de L'Argent, a Ă©tĂ© Ă©crit en 1917. Il demeure d'une Ă©tonnante actualitĂ© : "Pour la premiĂšre fois dans l'histoire du monde, les puissances spirituelles ont Ă©tĂ© toutes ensemble refoulĂ©es non point par les puissances matĂ©rielles mais par une seule puissance matĂ©rielle qui est la puissance de l'argent StreamLa mort n'est rien - Charles PĂ©guy - Dominique Piat by Jean-Pierre HanĂ© , "Mon petit théùtre sonore" on desktop and mobile. Play over 265 million tracks for free on SoundCloud. Etbien souvent la vie passionnĂ©e d'un homme empĂȘche de les voir de son vivant. C'est quand le corps meurt que l'esprit naĂźt vĂ©ritablement Ă  lui-mĂȘme et brille de son Ă©clat singulier. Ce que nous voulons cĂ©lĂ©brer cette annĂ©e, Ă  l'occasion du centenaire de la mort de PĂ©guy, n'est rien moins que sa mort, c'est sa vie mĂȘme. Quand il s Lefil n'est pas coupĂ©. La mort n'est rien. Je suis simplement passĂ© Dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi, vous ĂȘtes vous. Ce que nous Ă©tions les uns pour les autres, Nous le sommes toujours. Donnez-moi le nom que vous m'avez toujours donnĂ©. Parlez-moi comme vous l'avez toujours fait, N'employez pas de ton diffĂ©rent Ne prenez pas un ton solennel et PoĂšmede Charles PEGUY La mort n’est rien, je suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi, vous ĂȘtes vous. Ce que nous Ă©tions les uns pour les autres, nous le sommes toujours. Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donnĂ©, Parlez-moi comme vous l’avez toujours fait, N’employez pas un ton solennel ou triste, Continuez Ă  rire de ce qui nous faisait rire ensemble Cadeau Original Pour Anniversaire De Rencontre. Le poĂšte et essayiste, mort il y a plus de cent ans, ne fut pas seulement un brillant styliste. Il fut aussi et surtout un socialiste intransigeant, un critique farouche du progrĂšs et du scientisme. Conspuant un monde perverti par l’argent et des hommes qui se prennent pour Dieu, sa pensĂ©e mystique rĂ©sonne avec notre Ă©poque, Ă  l’heure oĂč les technoprophĂštes entendent imposer leur approche algorithmique de la vie, et refonder ni plus ni moins la nature humaine. Je ne sais pas si vous avez remarquĂ© mais, en France, tout le monde est pĂ©guyste ! » Impossible de contredire Matthieu Giroux, rĂ©dacteur en chef de la revue littĂ©raire Philitt l’écrivain a ceci de particulier qu’il suscite l’admiration de personnalitĂ©s issues d’horizons et de traditions politiques divers, voire franchement antagonistes. Et ce ne sont pas de faux pĂ©guystes, ajoute le journaliste, auteur du livre Charles PĂ©guy, un enfant contre le monde moderne Éditions PremiĂšre Partie, 2018. Vous avez Alain Finkielkraut, le pĂ©guyste barressien, de droite. Il y a Edwy Plenel, le pĂ©guyste socialiste, de gauche. En politique, il y a François Bayrou et Nicolas Dupont-Aignan
 Tous diront qu’ils aiment PĂ©guy pour sa libertĂ©. PĂ©guy, c’est le socialiste contre le Parti socialiste. C’est le catholique contre l’institution catholique. C’est le rĂ©publicain mystique contre les fossoyeurs de la RĂ©publique. Il est toujours le garant d’une certaine puretĂ©, d’une intransigeance. » RĂ©habilitation tardive Longtemps, Charles PĂ©guy a souffert d’une mauvaise rĂ©putation, rĂ©cupĂ©rĂ© notamment par le rĂ©gime de Vichy et les nationalistes catholiques. Pour eux, PĂ©guy n’était que ce paysan chrĂ©tien mort Ă  la guerre en patriote. Cet homme qui louait les vertus de l’enracinement et avait forgĂ© une pensĂ©e du sol et de l’attachement. Cet intellectuel mystique qui parlait de race française ». Mais depuis plusieurs annĂ©es, et plus prĂ©cisĂ©ment depuis le centiĂšme anniversaire de sa mort au champ d’honneur le 5 septembre 1914 Ă  Villeroy, en Seine-et-Marne, quelque chose semble avoir changĂ©. Et revoilĂ  PĂ©guy, plus contemporain et respectable que jamais, prĂȘt Ă  nous aider Ă  comprendre les mystĂšres de notre temps Il est urgent et nĂ©cessaire de le lire pour l’actualitĂ© brĂ»lante de sa pensĂ©e et les antidotes qu’il fournit aux poisons qui rongent notre sociĂ©tĂ© », lance avec emphase le philosophe Damien Le Guay, qui a publiĂ© en 2014 Les HĂ©ritiers PĂ©guy Bayard. Le monde relĂšve de PĂ©guy, et de plus en plus », a pu commenter de son cĂŽtĂ© le journaliste et historien Jacques Julliard, classĂ© Ă  gauche. Portrait de Charles PĂ©guy par EugĂšne Pirou / Internet ArchivePourquoi relire PĂ©guy aujourd’hui ? Pourquoi en parler ici, dans les pages d’Usbek & Rica ? Pourquoi l’auteur de Notre Patrie 1905, Notre jeunesse 1910 et L’Argent 1913 est-il vĂ©nĂ©rĂ© par ses fans comme un groupe culte dont l’Ɠuvre aurait eu une influence dĂ©cisive mais trop souvent ignorĂ©e ? Pour rĂ©pondre Ă  ces questions, il convient d’opĂ©rer un retour sur la vie courte mais dense de cet auteur prolifique dont la conviction totale imposait le respect », selon les mots d’AndrĂ© Gide. Les vertus de la pauvretĂ© Charles PĂ©guy naĂźt en 1873 Ă  OrlĂ©ans. Sa mĂšre est rempailleuse de chaises, son pĂšre menuisier. Ce dernier meurt alors qu’il n’a que quelques mois. En dĂ©pit de ce dĂ©cĂšs prĂ©coce, PĂ©guy vit une enfance heureuse, dont il garde un souvenir magnifiĂ©. Il vantera les mĂ©rites de cette vie simple, digne, les vertus de la pauvretĂ© dans un monde encore Ă©pargnĂ© par le capitalisme, la spĂ©culation et le pouvoir de l’argent. On ne gagnait rien ; on ne dĂ©pensait rien ; et tout le monde vivait. Il n’y avait pas cet Ă©tranglement Ă©conomique d’aujourd’hui, cette strangulation scientifique, froide, rectangulaire, rĂ©guliĂšre, propre, nette, sans bavure, implacable, sage, commune, constante, commode comme une vertu, oĂč il n’y a rien Ă  dire, et oĂč celui qui est Ă©tranglĂ© a si Ă©videmment tort », Ă©crit-il en 1913 dans L’Argent. Dans ce mĂȘme texte comme dans le reste de son Ɠuvre, PĂ©guy cĂ©lĂšbre l’artisanat et le travail manuel. J’ai vu toute mon enfance rempailler des chaises exactement du mĂȘme esprit et du mĂȘme cƓur, et de la mĂȘme main, que ce mĂȘme peuple avait taillĂ© ses cathĂ©drales », affirme-t-il. PĂ©guy est un Ă©lĂšve brillant, quoiqu’un peu insolent. Il attire en tout cas l’attention du directeur de l’École normale d’instituteurs d’OrlĂ©ans, ThĂ©ophile Naudy, qui le prend sous son aile. Reçu premier au certificat d’études en 1884, bachelier Ăšs lettres en 1891, il parvient Ă  intĂ©grer l’École normale supĂ©rieure de la rue d’Ulm en 1894. C’est une consĂ©cration et un moment charniĂšre. Le jeune provincial dĂ©couvre la capitale et sort de l’enfance. La citĂ© socialiste harmonieuse L’ENS est alors un creuset bouillonnant, un espace de libertĂ© et de dĂ©bats intenses. Charles PĂ©guy y suit les cours de Romain Rolland et d’Henri Bergson. Il se lie d’amitiĂ© avec le bibliothĂ©caire de l’école, Lucien Herr, agrĂ©gĂ© de philosophie et socialiste de la premiĂšre heure. Lucien Herr est un puits de science. Il passe pour avoir tout lu, dans toutes les langues. Il sera – soit dit en passant – l’un des fondateurs de la Ligue des droits de l’homme et du quotidien L’HumanitĂ©. Surtout, il initie et convertit plusieurs gĂ©nĂ©rations d’étudiants au socialisme. Comme Jean JaurĂšs et LĂ©on Blum avant lui, Charles PĂ©guy est sĂ©duit et entame ce qu’il nomme sa premiĂšre conversion ». À la bibliothĂšque de l’ENS, il rencontre justement JaurĂšs, de quatorze ans son aĂźnĂ©, et commence Ă  le frĂ©quenter assidĂ»ment. Il publie ses premiers articles dans La Revue socialiste et signe en 1897 Jeanne d’Arc, un premier texte plus littĂ©raire, dĂ©crit comme un mystĂšre lyrique ». Le premier devoir social, c’est d’arracher le misĂ©rable Ă  sa misĂšre. Il en faisait un impĂ©ratif catĂ©gorique. » Le socialisme de PĂ©guy est utopique et libertaire. Le jeune homme rĂȘve d’une sociĂ©tĂ© fraternelle, d’un idĂ©al d’amour et d’égalitĂ© entre les hommes. Il incarne un socialisme Ă  la française, que l’on peut retrouver chez Proudhon ou Leroux. Un socialisme qui ne va pas ĂȘtre contaminĂ© par le marxisme », a pu expliquer Camille Riquier, maĂźtre de confĂ©rences en philosophie et auteur de Philosophie de PĂ©guy, ou les MĂ©moires d’un imbĂ©cile PUF, 2017. Un socialisme primitif », complĂšte Matthieu Giroux. Deux textes attestent Ă  l’époque de cette vision De la citĂ© socialiste 1897 et Marcel, premier dialogue de la citĂ© harmonieuse 1898. PĂ©guy y Ă©nonce les principes qui doivent rĂ©gir sa citĂ© socialiste idĂ©ale. En premier lieu, l’idĂ©e d’une citĂ© inclusive ne laissant personne sur le bord de la route et permettant Ă  tous de vivre dĂ©cemment. Le premier devoir social, c’est d’arracher le misĂ©rable Ă  sa misĂšre. Il en faisait un impĂ©ratif catĂ©gorique », pointe Camille Riquier. Nul n’est exclu dans la citĂ© socialiste selon PĂ©guy La citĂ© harmonieuse a pour citoyens tous les vivants qui sont des Ăąmes, tous les vivants animĂ©s, parce qu’il n’est pas harmonieux, parce qu’il ne convient pas qu’il y ait des Ăąmes qui soient des Ă©trangĂšres, parce qu’il ne convient pas qu’il y ait des vivants animĂ©s qui soient des Ă©trangers », Ă©crit-il. Le jeune auteur parle de vivants animĂ©s » et considĂšre que les animaux – bien que dĂ©crits ailleurs comme des Ăąmes adolescentes » – sont des citoyens Ă  part entiĂšre de sa citĂ©, devançant de plusieurs dĂ©cennies les rĂ©flexions animalistes qui s’imposent aujourd’hui dans le dĂ©bat. Tous les animaux sont devenus citoyens de la citĂ© harmonieuse », prĂ©cise l’écrivain. © Valentin Tkach pour Usbek & RicaPĂ©guy peut ĂȘtre perçu comme l’un des prĂ©curseurs de la pensĂ©e Ă©cologiste. Il manifeste une attention particuliĂšre Ă  une forme d’harmonie et d’osmose avec la nature. Cette prĂ©occupation rejoint sa vision du travail il s’agit d’assurer la vie corporelle de la citĂ© » par les produits naturels cueillis et par les produits des travaux non malsains ». Non malsains, c’est-Ă -dire qui ne dĂ©forment ni les Ăąmes, ni les corps des travailleurs. Les biens superflus et le luxe, eux, n’ont pas leur place dans le monde imaginĂ© par PĂ©guy. Il s’agit dĂ©jĂ , mĂȘme si le terme n’est pas employĂ© par l’écrivain, de penser et bĂątir une citĂ© frugale. La concurrence est mauvaise en son principe il est mauvais que les hommes travaillent les uns contre les autres » La compĂ©tition dans le travail, elle, est rejetĂ©e car source de tous les maux. La concurrence est mauvaise en son principe il est mauvais que les hommes travaillent les uns contre les autres ; les hommes doivent travailler les uns avec les autres ; ils doivent travailler Ă  faire de leur mieux leur travail, et non pas Ă  se servir de leur travail pour vaincre d’autres travailleurs, Ă©crit Charles PĂ©guy dans De la citĂ© socialiste. La concurrence est souvent faussĂ©e par la rĂ©clame, qui tend Ă  donner l’avantage au travail plus connu sur le travail mieux fait 
. Enfin la concurrence internationale est cause de la guerre, de la paix armĂ©e, des maux qui suivent, comme la concurrence interindividuelle est cause des procĂšs, de vĂ©ritables guerres privĂ©es, de la plupart des haines publiques et privĂ©es, des maux qui suivent. » Surtout, pour PĂ©guy, le travail n’est pas une fin en soi mais un moyen permettant, une fois la vie corporelle des citoyens assurĂ©e, de s’adonner Ă  d’autres activitĂ©s plus Ă©panouissantes, comme l’art ou la philosophie. Dans la citĂ© de PĂ©guy, il n’y a plus ni propriĂ©tĂ© ni hĂ©ritage. La gratuitĂ© est au principe de tout. L’intransigeance et la solitude Le socialisme de PĂ©guy, c’est une maniĂšre de recommencer la RĂ©volution française. La rĂ©volution devait se refaire chaque jour. La rĂ©volution socialiste devait ĂȘtre l’aboutissement de la RĂ©volution française bourgeoise, qui avait Ă©tĂ© ratĂ©e parce que imprĂ©parĂ©e », explique Camille Riquier dans une interview accordĂ©e Ă  France Culture. L’affaire Dreyfus, qui secoue la sociĂ©tĂ© française Ă  la fin XIXe siĂšcle, est une nouvelle occasion pour PĂ©guy d’affirmer et d’approfondir son engagement. Pour lui, cette affaire, comme le socialisme, est une question morale, d’humanitĂ©. Alors qu’il Ă©choue Ă  l’agrĂ©gation de philosophie, PĂ©guy est un des premiers Ă  se jeter dans la bataille. Il dĂ©cide de quitter l’École normale supĂ©rieure et, avec Lucien Herr et LĂ©on Blum, fonde dans le Quartier latin la Librairie Bellais, quartier gĂ©nĂ©ral des dreyfusistes. La une du Petit Journal du 23 dĂ©cembre 1894. Illustration d’Henri Meyer. / BibliothĂšque nationale de FranceIci se lit une des dimensions essentielles de la personnalitĂ© de PĂ©guy son rejet des institutions, son engagement corps et Ăąme dans les combats de son temps, son aspiration Ă  un socialisme pur. Cela se traduit dans son mode de vie. Il fallait vivre comme un socialiste. Vivre en misĂ©rable parmi les misĂ©rables. Je ne vois pas de meilleur exemple d’homme authentique, d’authentique socialiste », souligne Camille Riquier. Peu Ă  peu, il reproche Ă  ses amis – JaurĂšs notamment – de transformer l’affaire Dreyfus en une affaire politique, lĂ  oĂč lui y voit un combat mystique. Sa cĂ©lĂšbre sentence – Tout commence en mystique et tout finit en politique » – affleure dĂ©jĂ . Il la couche sur le papier en 1910, dans son livre Notre jeunesse, oĂč il revient largement sur le combat dreyfusiste. La mystique, pour PĂ©guy, c’est la fidĂ©litĂ© aux premiers temps des engagements, explique Matthieu Giroux. Dans le socialisme, ça signifie ĂȘtre fidĂšle Ă  Fourier, Ă  Saint-Simon, au socialisme primitif. Être mystique dans l’affaire Dreyfus, c’est rester fidĂšle Ă  Bernard Lazare, que l’on a trahi et laissĂ© pour mort dans un coin mais qui Ă©tait le premier Ă  dĂ©fendre Dreyfus. Dans le catholicisme, c’est ĂȘtre fidĂšle Ă  l’enseignement du Christ plutĂŽt qu’à l’Église de Rome. » À l’opposĂ© de cette logique, il y a la politique entendue comme le jeu des partis, des compromis et des compromissions, ce qu’on appellera bien plus tard, de façon pĂ©jorative, la politique politicienne ». La mystique rĂ©publicaine, c’était quand on mourait pour la RĂ©publique, la politique rĂ©publicaine, c’est Ă  prĂ©sent qu’on en vit », Ă©crit ainsi PĂ©guy dans Notre jeunesse. Dire la vĂ©ritĂ©, toute la vĂ©ritĂ©, rien que la vĂ©ritĂ©, dire bĂȘtement la vĂ©ritĂ© bĂȘte, ennuyeusement la vĂ©ritĂ© ennuyeuse, tristement la vĂ©ritĂ© triste » La Librairie Bellais ne fait pas long feu. Elle est rapidement au bord de la faillite. PĂ©guy s’éloigne de ses amis Lucien Herr et LĂ©on Blum. En rĂ©action Ă  une motion votĂ©e par le CongrĂšs socialiste, qui recommande aux diverses fractions socialistes de ne pas publier de choses susceptibles de nuire aux combats menĂ©s pour rĂ©aliser l’unitĂ© de parti, notamment par Jean JaurĂšs, il fonde les Cahiers de la Quinzaine, qui deviendra l’Ɠuvre de sa vie, son sacerdoce. Avec les Cahiers, il s’agit de dire la vĂ©ritĂ©, toute la vĂ©ritĂ©, rien que la vĂ©ritĂ©, dire bĂȘtement la vĂ©ritĂ© bĂȘte, ennuyeusement la vĂ©ritĂ© ennuyeuse, tristement la vĂ©ritĂ© triste ». C’est un prolongement de son engagement dreyfusiste, ce combat pour la » vĂ©ritĂ© et contre la vĂ©ritĂ© d’État.   Avec cette publication, qui restera relativement confidentielle puisqu’elle ne comptera jamais plus de 1 500 abonnĂ©s, PĂ©guy ouvre de nombreux fronts. Il combat le nationalisme anti-dreyfusiste, l’antimilitarisme des universitaires, le combisme anticlĂ©rical du nom d’Émile Combes, prĂ©sident du Conseil des ministres de 1902 Ă  1905 reconnu pour son combat contre l’Église, qui a notamment instaurĂ© l’interdiction d’enseignement par les congrĂ©gations religieuses, ndlr, les exactions coloniales, les persĂ©cutions raciales et l’oppression des minoritĂ©s nationales dans l’Europe des empires. Je suis un journaliste de quinzomadaire et je travaille sur les misĂšres du prĂ©sent », Ă©crit-il. PĂ©guy, des dĂ©cennies avant Sartre, est sans doute une des premiĂšres grandes figures de l’intellectuel engagĂ©. Chez lui, il y a du spirituel dans l’engagement, souligne Edwy Plenel, cofondateur et rĂ©dacteur en chef du site Mediapart, l’idĂ©e qu’en s’engageant on peut s’élever au-dessus de soi-mĂȘme. » Il y a chez PĂ©guy une tension entre l’individu et la citĂ©, une tension qui se concentre bien dans l’idĂ©e de mystique » PĂ©guy rencontre de nombreuses personnalitĂ©s de son temps et contribue, avec ses Cahiers de la Quinzaine, Ă  faire dĂ©couvrir de nouvelles plumes. Ainsi de Romain Rolland, Julien Benda, Georges Sorel, Daniel HalĂ©vy ou AndrĂ© SuarĂšs. Toutefois, par son intransigeance et sa ferveur, il se brouille avec tout le monde À la fin, les Cahiers de la Quinzaine, c’était PĂ©guy tout seul », pointe Alexandre de Vitry, docteur en littĂ©rature et auteur de Conspirations d’un solitaire, l’individualisme civique de Charles PĂ©guy Les Belles Lettres, 2015. Il y a chez PĂ©guy une tension entre l’individu et la citĂ©, poursuit-il, une tension qui se concentre bien dans l’idĂ©e de mystique, cet Ă©lan primitif qui anime tout commencement d’une vie civique. Le prix Ă  payer de cette mystique, c’est la solitude, et cela donne Ă  l’Ɠuvre de PĂ©guy une dimension individualiste. Il ne cesse de produire de la rupture, et il le fait au nom de l’harmonie, de la citĂ©. C’est une sorte de quadrature du cercle. » PĂ©guy, de fait, rĂ©ussit Ă  faire le vide autour de lui. La mĂ©taphysique contre le progrĂšs En 1908, PĂ©guy renoue avec la foi chrĂ©tienne de son enfance. C’est sa seconde conversion ». Mais lĂ  encore, il s’inscrit en faux contre l’institution catholique, qui dĂ©voie selon lui le message du Christ. Les institutions, par essence, lui paraissent oppressives. Alors que le conflit avec l’Allemagne se profile, son amitiĂ© de longue date avec Jean JaurĂšs n’est plus d’actualitĂ©. PĂ©guy lui reproche sa compromission dans le combisme et la politique politicienne, son pacifisme, et en vient mĂȘme Ă  souhaiter sa mort. DĂšs la dĂ©claration de guerre, la premiĂšre chose que nous ferons sera de fusiller JaurĂšs. Nous ne laisserons pas derriĂšre nous un traĂźtre pour nous poignarder dans le dos », Ă©crit-il, sans se douter que Raoul Villain, un Ă©tudiant nationaliste proche de l’Action française, allait assassiner le leader socialiste le soir du 31 juillet 1914. Lorsque la guerre Ă©clate, PĂ©guy s’engage dans l’armĂ©e et, le 5 septembre 1914, meurt, sabre au clair, tuĂ© d’une balle en plein front alors qu’il exhortait sa compagnie Ă  tenir sa position. Il avait 41 ans. Le vrai cƓur de PĂ©guy, c’est sa postĂ©ritĂ©, avance le philosophe Damien Le Guay. De son vivant, il est restĂ© marginal. Il n’a connu sa gloire qu’aprĂšs lui. Tout ce qu’il a pensĂ© de son vivant, on le comprend aujourd’hui. » PĂ©guy critique la confiance du scientifique en l’exactitude de son rĂ©sultat alors que le rĂ©el, par essence, est imprĂ©vu » Justement, que comprend-on ? Ce qui interpelle, outre son engagement dans les combats de son temps, c’est surtout sa critique de la modernitĂ© et sa clairvoyance quant au monde qui nous attendait. Pour PĂ©guy, le monde moderne est celui qui s’est installĂ© en lieu et place du monde socialiste qu’il attendait. Un monde dĂ©voyĂ© par l’argent, qui tourne le dos au passĂ© et se dĂ©fie de toutes les cultures. Ce monde moderne, c’est un monde qui veut supprimer la mĂ©taphysique au nom du progrĂšs, prĂ©cise Charles Coustille, auteur de Parking PĂ©guy Flammarion, 2019. C’est l’idĂ©e que le progrĂšs et la science peuvent nous sauver de tout. PĂ©guy critique la confiance du scientifique en l’exactitude de son rĂ©sultat alors que le rĂ©el, par essence, est imprĂ©vu. Le scientifique, lui, plaque toujours des unitĂ©s sur le vivant. » © Valentin Tkach pour Usbek & RicaLa critique de l’histoire qu’il adresse Ă  Ernest Renan, chantre du positivisme en France et figure Ă©minente de la Sorbonne, conteste l’idĂ©e d’une histoire qui serait linĂ©aire, telle une marche en avant. LĂ  rĂ©side sans doute une part substantielle de l’actualitĂ© de PĂ©guy. C’est la question du progrĂšs pour lui-mĂȘme, souligne Damien Le Guay, et c’est une question d’aujourd’hui. PĂ©guy explique que tout ramener Ă  une question de calcul, d’organisation et de progrĂšs favorise une nouvelle mĂ©taphysique qui est celle de l’argent. Alors quand vous avez quelque chose comme Google, une sociĂ©tĂ© hyper capitaliste qui entend corriger les dĂ©fauts de l’homme et fait la promesse eschatologique d’abolir la mort, il me semble qu’on est au bout du dĂ©senchantement dont parlait PĂ©guy. » PĂ©guy, pĂšre spirituel de la rĂ©sistance au transhumanisme ? Si l’on veut, rĂ©pond Alexandre de Vitry Il y a des Ă©lĂ©ments chez PĂ©guy qui rĂ©sonnent avec ça, il reproche beaucoup Ă  ses contemporains de vouloir sortir de leur ordre, de se prendre pour Dieu. On retrouve ça aujourd’hui, mais PĂ©guy n’était pas le Jacques Ellul pionnier de la critique de la technique en France, auteur notamment de La Technique ou l’Enjeu du siĂšcle, ndlr que certains voudraient en faire. » PĂ©guy Ă©tait en colĂšre contre son Ă©poque, qui est trĂšs semblable Ă  la nĂŽtre » Edwy Plenel, lui, retient surtout de PĂ©guy sa critique prĂ©monitoire du capitalisme et du rĂšgne de l’argent. PĂ©guy Ă©tait en colĂšre contre son Ă©poque, qui est trĂšs semblable Ă  la nĂŽtre, explique-t-il dans une interview au Nouvel Observateur. Une Ă©poque de transition, de rĂ©volution industrielle, de spĂ©culation financiĂšre, un Ă©branlement Ă©conomique, gĂ©opolitique, social. Et il est en colĂšre contre l’universelle marchandise. VoilĂ  sa cible l’abaissement dans la marchandise, dans l’argent. Et c’est le socle de sa colĂšre l’universelle marchandise, qui prend tout, qui prostitue tout, qui uniformise tout. » Des mots qui ont directement inspirĂ© l’un des plus cĂ©lĂšbres discours de François Mitterrand, prononcĂ© le 13 juin 1971 lors du fameux congrĂšs fondateur » d’Épinay Le vĂ©ritable ennemi 
 c’est le Monopole ! Terme extensif pour signifier toutes les puissances de l’argent, l’argent qui corrompt, l’argent qui achĂšte, l’argent qui Ă©crase, l’argent qui tue, l’argent qui ruine, et l’argent qui pourrit jusqu’à la conscience des hommes ! » L’érection de la science et de l’argent dans le rĂŽle de nouveaux dieux, voilĂ  le problĂšme pour PĂ©guy, qui dĂ©nonce le monde de ceux qui font le malin », qui ne croient en rien et en sont fiers. Si PĂ©guy Ă©tait vivant aujourd’hui, il serait dĂ©solĂ© au plus haut point, souffle Matthieu Giroux, mais au moins il pourrait rĂ©injecter du souffle dans le dĂ©senchantement. » Relire PĂ©guy pour son souffle et son extraordinaire plume, son art de la scansion et du verbe, voilĂ  dĂ©jĂ  une premiĂšre mission raisonnable pour l’immense majoritĂ© de nos contemporains. Retrouvez cet article dans le numĂ©ro 28 d’Usbek & Rica, paru Ă  l’automne 2019. Long read mag SUR LE MÊME SUJET > Les ennemis de la machine enquĂȘte sur les technocritiques > Patrick Chastenet Jacques Ellul Ă©tait un lanceur d’alerte » > Pourquoi il faut relire Le Mythe de la machine » > Pourquoi il faut relire L’Obsolescence de l’homme » de GĂŒnther Anders Illustration Ă  la une © Valentin Tkach pour Usbek & Rica 25 FĂ©vrier 2013 RĂ©digĂ© par LEVANA MEDIUM VOYANCE et publiĂ© depuis Overblog La mort n'est rien Je suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi. Tu es toi. Ce que nous Ă©tions l'un pour l'autre, nous le sommes toujours. Donne moi je nom que tu m'a toujours donnĂ©. Parle moi comme tu l'as toujours fait. N'emploie pas de ton diffĂ©rent. Ne prends pas un air solennel ou triste. Continue Ă  rire de ce qui nous faisait rire ensemble. Prie. Souris. Pense Ă  moi. Pire pour moi. Que mon nom soit toujours prononcĂ© Ă  la maison comme il a toujours Ă©tĂ©. Sans emphase d'aucune sorte et sans trace d'ombre. La vie signifie ce qu'elle a toujours signifiĂ©. Elle reste ce qu'elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n'est pas coupĂ©. Pourquoi serais-je hors de ta pensĂ©e, simplement parceque je suis hors de ta vue ? Je t'attends. Je ne suis pas loin. Juste de l'autre cĂŽtĂ© du chemin. "Charles Peguy" Source sur centerblog. Partager cet article Pour ĂȘtre informĂ© des derniers articles, inscrivez vous La mort n'est rienDe Charles PĂ©guy, d'aprĂšs un texte de Saint AugustinLa mort n’est rienJe suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  suis moi. Tu es que nous Ă©tions l’un pour l’autre, nous le sommes le nom que tu m’as toujours comme tu l’as toujours pas de ton prends pas un air solennel ou Ă  rire de ce qui nous faisait vivre Souris. Pense Ă  moi. Prie pour mon nom soit toujours prononcĂ© Ă  la maison comme il l’a toujours emphase d’aucune sorte et sans trace d’ombre. La vie signifie ce qu’elle a toujours reste ce qu’elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n’est pas serais-je hors de ta pensĂ©e,Simplement parce que je suis hors de ta vue ?Je t’attends. Je ne suis pas de l’autre cĂŽtĂ© du vois, tout est bien. Les invitĂ©s du Point TRIBUNE. Pascal Durand a critiquĂ© l'intervention de François-Xavier Bellamy au Parlement europĂ©en parce que celui-ci se rĂ©clame de Charles PĂ©guy. Portrait non datĂ© de l'Ă©crivain français Charles PĂ©guy. © INTERCONTINENTALE / AFP Par la merveille des rĂ©seaux sociaux, un dĂ©putĂ© europĂ©en fraĂźchement réélu, ancien Vert ralliĂ© Ă  En marche !, vient de dĂ©clencher l'ire gĂ©nĂ©rale en s'en prenant Ă  PĂ©guy. Plus exactement, Pascal Durand, puisque c'est son nom, s'indigne de ce que son collĂšgue François-Xavier Bellamy, pour sa premiĂšre intervention au Parlement de l'UE, se soit rĂ©clamĂ© du directeur des Cahiers de la Quinzaine, alors que ce dernier n'est autre, dit Pascal Durand, qu'un nationaliste belliqueux et rĂ©actionnaire ».À LIRE AUSSIBellamy dresse l'inventaire de la droiteLes rĂ©actions les plus vives, dans la presse ou sur Twitter, ne se sont pas fait attendre. Il y a quelque chose de rassurant Ă  voir combien nos contemporains tiennent encore Ă  PĂ©guy dans toute sa complexitĂ©, et refusent de le voir rĂ©duit Ă  quelque chose qu'il ne fut nullement. Mais ce menu fait divers de la logomachie contemporaine peut aussi nous intervention de fxbellamy au PE, il commence par une citation de Charles Peguy... rĂ©fĂ©rence naturellement innocente Ă  un nationaliste belliqueux et rĂ©actionnaire ÇaPromet— Pascal DURAND PDurandOfficiel 16 juillet 2019 C'est peut-ĂȘtre qu'une figure comme la sienne est devenue pour certains proprement incomprĂ©hensibleRappelons les faits. PĂ©guy fut un dreyfusard anarchisant, un socialiste vibrant et militant, mais il eut le mauvais goĂ»t de se convertir au christianisme et de dĂ©velopper un patriotisme trĂšs particulier, traversĂ© par le souvenir de l'histoire de France et l'inquiĂ©tude de la guerre Ă  venir. Cependant, quoiqu'il se retournĂąt contre JaurĂšs, son ancien maĂźtre, il ne se renia jamais son christianisme mĂątinĂ© d'anticlĂ©ricalisme se prĂ©sentait comme une religion des pauvres, et son patriotisme est celui des Soldats de l'an II, pas de Maurras et de ses PĂ©guy peut-il alors se retrouver ainsi qualifiĂ© aujourd'hui ? C'est peut-ĂȘtre qu'une figure comme la sienne est devenue pour certains proprement incomprĂ©hensible. Examinons le chef d'accusation un mot aprĂšs l' belliqueux » ? Belliciste, pourquoi pas, puisqu'il jugeait la guerre avec l'Allemagne inĂ©vitable et qu'il eut l'indĂ©licatesse de mourir au front dans les tout premiers jours du conflit. Mais PĂ©guy avait-il forcĂ©ment tort ? Les abus rĂ©cents de l'idĂ©e de guerre juste », par les États-Unis en particulier, nous ont peut-ĂȘtre rendus sourds Ă  ce genre d'engagement. Pascal Durand eĂ»t-il jugĂ© PĂ©guy belliqueux » si celui-ci avait tenu le mĂȘme discours en 1938 ? Pas sĂ»r. Or ce que PĂ©guy dĂ©nonce dans l'Allemagne de son temps, c'est prĂ©cisĂ©ment le germe de ce qu'elle deviendra dans les dĂ©cennies suivantes et qu'il n'Ă©tait d'ailleurs pas le premier Ă  remarquer impĂ©rialisme, vision raciale du monde, volontĂ© de domination. La mort infiniment regrettable de PĂ©guy au combat, qui interrompit pour toujours son Ɠuvre, n'annule pas sa rĂ©actionnaire » ? Il est vrai que PĂ©guy aime le passĂ©, proche ou lointain, tous les passĂ©s d'ailleurs, et qu'il aime voir ce passĂ© ressurgir dans le prĂ©sent de chacun. Mais le rĂ©actionnaire, c'est celui qui veut revenir en arriĂšre, Marx l'a bien vu. PĂ©guy ne souhaite nullement cela, lui qui fut si sensible, prĂ©cisĂ©ment, aux particularitĂ©s de son temps, aux possibilitĂ©s propres qui lui Ă©taient offertes, aux risques que nous courions et aux missions qui devaient ĂȘtre dĂ©sormais les nĂŽtres. Sommes-nous arrivĂ©s un siĂšcle plus tard Ă  un point oĂč toute rĂ©flexion sur ce qui, du passĂ©, nous travaille sera jugĂ©e rĂ©actionnaire ? Dans ce cas, que nous restera-t-il ?Le patriotisme de PĂ©guy n'est pas un narcissisme collectif ni un nationalisme dĂ©guisĂ© il est l'antidote le plus efficace Ă  la pathologie nationalisteMais passons au plus raide PĂ©guy nationaliste ». C'est Ă  ce mot que les lecteurs du fameux tweet se sont Ă©tranglĂ©s, Ă  raison. PĂ©guy est justement contemporain de l'Ă©mergence du nationalisme moderne, qui en son temps se nommait nationalisme intĂ©gral », sous la houlette de Charles Maurras. Et PĂ©guy n'a rien, absolument rien Ă  voir avec cette tradition nĂ©e de l'antidreyfusisme et d'un certain catholicisme antifraternitaire. Le maurrassien Pierre Lasserre ne s'y trompait pas, jugeant qu'il manquait Ă  PĂ©guy une cervelle organisĂ©e ». Le patriotisme de PĂ©guy, qui se rĂ©clame de Corneille, de Michelet et de Victor Hugo rĂ©actionnaires, eux aussi ?, n'est ni contre-rĂ©volutionnaire, ni autoritariste, ni antisĂ©mite. Il ne fait certainement pas la chasse aux mĂ©tĂšques ». Il n'est pas non plus une affaire de parti, une banniĂšre, ce que le nationalisme, lui, est toujours – jusqu'aujourd'hui sous l'Ă©tiquette du Rassemblement national » qui ne rassemble que lui-mĂȘme, contre les autres. PĂ©guy, lui, est patriote dans la mesure oĂč tout Français peut l'ĂȘtre, sans restriction. PĂ©guy dĂ©fend ce que la France a de prĂ©cieux, aux yeux du monde entier et pas seulement aux siens. Le patriotisme de PĂ©guy n'est pas un narcissisme collectif ni un nationalisme dĂ©guisĂ© il est l'antidote le plus efficace Ă  la pathologie nationaliste dont il observa en son temps les linĂ©aments. Pascal Durand ne paraĂźt pas comprendre cela. L'autre du nationalisme, ce n'est pas forcĂ©ment l'internationalisme, que celui-ci soit communiste ou capitaliste. C'est aussi le patriotisme de PĂ©guy et de Michelet. Deux auteurs particuliĂšrement chers, tenez, Ă  un certain gĂ©nĂ©ral belliqueux » de 1940.*Alexandre de Vitry est normalien et agrĂ©gĂ© de lettres modernes. Il vient de publier Sous les pavĂ©s, la droite » DesclĂ©e de Brouwer, 2018 Je m'abonne Tous les contenus du Point en illimitĂ© Vous lisez actuellement Charles PĂ©guy nationaliste belliqueux » ? Quelle ignorance ! Que lire, que voir, Ă  quel Ăąge ? 26 Commentaires Commenter Vous ne pouvez plus rĂ©agir aux articles suite Ă  la soumission de contributions ne rĂ©pondant pas Ă  la charte de modĂ©ration du Point. Vous ne pouvez plus rĂ©agir aux articles suite Ă  la soumission de contributions ne rĂ©pondant pas Ă  la charte de modĂ©ration du Point. Avers Effigie, de trois quart Ă  gauche, du poĂšte, en uniforme d’officier du 276e RĂ©giment d’ Des Ă©pis de blĂ© disposĂ©s en ogive de cathĂ©drale ou bien comme des mains jointes pour la lĂ©gende HEUREUX LES EPIS MURS ET LES BLES l’exergue 5 SEPTEMBRE 1914, jour de la mort de PĂ©guy. Historique Charles Peguy. Il y Ă  quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise pensĂ©e. C’est d’avoir une pensĂ©e toute faite ». Charles Peguy 1873-1914. PoĂšte et penseur engagĂ© de son Ă©poque, il est un des auteurs majeurs du XXĂšme siĂšcle. Pourtant, son hĂ©ritage intellectuel est aujourd’hui souvent mĂ©connu. Charles PĂ©guy est nĂ© le 7 janvier 1873 Ă  OrlĂ©ans. Il est le premier et l’unique enfant d’une famille d’artisans modestes. L’ardeur Ă  l’ouvrage et l’amour du travail bien fait sont tout le patrimoine de Charles PĂ©guy. Certes il est d’humble origine, mais ce n’est pas un dĂ©shĂ©ritĂ© ». Lorsqu’il se penche sur sa lignĂ©e, c’est pour tirer gloire d’une ascendance qui ne comprend ni grand nom, ni fortune, et qui pourtant recueille toute la richesse d’un peuple. L’anonyme est son patronyme » par cette formule de la Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartĂ©sienne, il rend hommage Ă  la foule de ceux qui ont existĂ© avant lui, analphabĂštes comme sa grand-mĂšre, intelligents et braves comme elle, capables de durer et de crĂ©er en dĂ©pit des Ă©preuves. Dans L’Argent, ouvrage paru en 1913, un an avant la mort de PĂ©guy, l’homme de quarante ans » nous dĂ©peint le monde de son enfance. C’est un monde idĂ©alisĂ©, parĂ© de toutes les vertus que le prĂ©sent n’a plus De mon temps, tout le monde chantait. » Le culte du travail, la sobriĂ©tĂ© des mƓurs sont la marque de ce monde rĂ©volu. Pourtant, PĂ©guy n’a pas toujours eu ce regard sur son passĂ©. Un autre texte, Ă©crit bien plus tĂŽt et restĂ© inachevĂ©, ajoute une touche d’ironie Ă  la nostalgie des souvenirs. Son titre, Ă  lui seul, est rĂ©vĂ©lateur Pierre, commencement d’une vie bourgeoise. Le jeune homme qui se penche alors sur son enfance ne la considĂšre pas avec la mĂȘme indulgence que l’auteur de L’Argent
 En dĂ©pit de son parcours personnel, s’élever dans la sociĂ©tĂ©, ne sera jamais pour lui un objectif. Bien au contraire, ce qu’il souhaite, c’est que soit rendu Ă  chacun la dignitĂ© de son Ă©tat Tous ensemble et chacun sĂ©parĂ©ment premiers. » Telle est sa conception de la dĂ©mocratie. Aussi ne voit-il qu’une perversion de l’esprit dĂ©mocratique » dans la fiertĂ© que sa mĂšre tire de sa rĂ©ussite, et qu’il raille en ces termes Que le fils d’un ouvrier mĂ©canicien fĂ»t reçu Ă  Saint-Cyr 
 c’était tout Ă  fait bien. Qu’un fils d’instituteur fĂ»t reçu Ă  Polytechnique, c’était mieux encore. Et que le fils d’une rempailleuse de chaises fĂ»t reçu Ă  l’Ecole normale supĂ©rieure, c’était la gloire mĂȘme. » Premiers engagements le socialisme et l’affaire Dreyfus. Jean JaurĂšs, normalien, professeur de philosophie, est un intellectuel qui a dĂ©cidĂ© d’entrer dans l’action politique pour promouvoir son idĂ©al de justice sociale. D’abord dĂ©putĂ© de centre gauche, il adhĂšre au socialisme Ă  l’époque oĂč ce courant de pensĂ©e, nourri des utopies de la premiĂšre moitiĂ© du dix-neuviĂšme siĂšcle, n’a pas encore subi l’attraction du marxisme. A l’Ecole normale supĂ©rieure, PĂ©guy subit l’influence de ce grand aĂźnĂ©, relayĂ©e par celle de Lucien Herr, le bibliothĂ©caire de l’Ecole. Avec quelques camarades, il se livre Ă  de grands dĂ©bats d’idĂ©es dans sa chambre, baptisĂ©e la thurne Utopie ». DĂšs 1895, PĂ©guy devient membre du Parti socialiste. Avant de s’engager politiquement, l’étudiant milite Ă  la Mie de Pain, une association caritative qui distribue de la nourriture aux indigents de la capitale. Pour PĂ©guy, supprimer la misĂšre est le premier devoir, parce que la misĂšre prive l’homme de son humanitĂ©. Il ne la confond pas avec la pauvretĂ©, qu’il a connue dans son enfance, et dont il ferait presque un idĂ©al de vie. La pauvretĂ© engendre la solidaritĂ©. La misĂšre est synonyme d’exclusion. Le misĂ©reux est mis au ban de la sociĂ©tĂ©, mais, plus radicalement, n’ayant pas les moyens de penser Ă  autre chose qu’à sa survie, il est rejetĂ© hors de l’humanitĂ©. Or toute la pensĂ©e de PĂ©guy et tous ses engagements reposent sur le refus de l’exclusion. Penseur dans la citĂ©, PĂ©guy est d’abord un penseur de la citĂ©, qui ne peut admettre qu’aucune crĂ©ature, humaine ou animale, demeure en marge, soit Ă©trangĂšre ». En mĂȘme temps, il est hostile Ă  toute forme d’asservissement du singulier au collectif. La sociĂ©tĂ© socialiste de PĂ©guy ne cherche aucunement Ă  transformer les hommes en leur inculquant des principes ou une idĂ©ologie. Au contraire, elle s’efforce, par son organisation Ă©conomique, de leur donner la possibilitĂ© d’exister tels qu’ils sont, dans leur diversitĂ©. Cette vision que PĂ©guy dĂ©ploie dĂšs 1896 dans un texte de jeunesse intitulĂ© Marcel, Premiers Dialogues de la citĂ© harmonieuse, exprime l’essence de son socialisme. Elle permet de comprendre tout ce qui devait l’opposer au socialisme historique qui se met en place avec la crĂ©ation de la unifiĂ©e sur les bases du marxisme, et se dĂ©veloppe tout au long du XXe siĂšcle pour culminer dans le communisme totalitaire. L’unitĂ© fait horreur Ă  PĂ©guy, car elle suppose l’uniformitĂ©. Pour lui, il n’y a pas de rĂ©volution sociale lĂ©gitime sans respect de la personne et de sa singularitĂ©. A OrlĂ©ans, il fonde un groupe d’étudiants socialistes, au grand dam de sa mĂšre, qui redoute les ennuis que pourraient lui valoir ses activitĂ©s politiques. Il a demandĂ© une annĂ©e de congĂ© afin de pouvoir se consacrer Ă  sa premiĂšre grande Ɠuvre une vie de Jeanne d’Arc, qu’il rĂ©dige de fin 1895 Ă  fin 1896. L’hĂ©roĂŻne, qui n’a pas encore Ă©tĂ© canonisĂ©e ni accaparĂ©e par la droite nationaliste, est alors cĂ©lĂ©brĂ©e par les rĂ©publicains comme une figure patriotique, sortie du peuple et sauvant le peuple. Ce qui fascine en elle le jeune PĂ©guy, c’est son engagement solitaire au cƓur de la mĂȘlĂ©e. Cet enthousiasme des premiers temps conduit PĂ©guy Ă  des initiatives audacieuses. EncouragĂ© par Lucien Herr, il s’associe Ă  d’autres camarades, parmi lesquels LĂ©on Blum, le futur dirigeant de la pour fonder une maison d’édition socialiste, la SociĂ©tĂ© Nouvelle de Librairie et d’Edition. Bien qu’il se soit inscrit Ă  l’AgrĂ©gation de philosophie, PĂ©guy est prĂȘt Ă  renoncer Ă  l’enseignement et Ă  la carriĂšre universitaire pour une existence plus risquĂ©e, toute entiĂšre vouĂ©e Ă  la transmission de ses convictions. Le mĂ©tier de libraire ainsi entendu lui convient Ă  merveille, et il adresse finalement sa dĂ©mission au directeur de l’Ecole normale supĂ©rieure afin d’avoir les mains libres pour se lancer dans la carriĂšre de son choix. L’annĂ©e 1898 a vu les passions se dĂ©chaĂźner autour de l’affaire Dreyfus dans le sillage de JaurĂšs et de Zola, PĂ©guy s’engage, signant des pĂ©titions, manifestant Ă  la tĂȘte de groupes d’étudiants en faveur du capitaine injustement accusĂ©. Alors, il combat en chef militaire » de l’Ecole normale supĂ©rieure. Avec JaurĂšs, il est convaincu que le devoir des socialistes est de s’élever contre la raison d’Etat quand elle fait cause commune avec l’injustice, mĂȘme si la victime de cette injustice est un bourgeois ». PĂ©guy dissident. En dĂ©cembre 1899 se tient un congrĂšs lors duquel est adoptĂ©, au nom de l’unitĂ© du Parti, le principe de la censure dans les journaux et publications socialistes. DĂ©sormais, il y aura une vĂ©ritĂ© socialiste, Ă  laquelle tous devront se conformer. Parce qu’il n’accepte pas ce tournant, PĂ©guy se trouve en opposition avec les membres de la SociĂ©tĂ© nouvelle de librairie et d’édition, qui, eux, suivent le Parti. La rupture est consommĂ©e. DĂšs lors, PĂ©guy est seul. Seul contre ses amis d’hier, seul contre le mouvement de l’histoire. Mais il n’a renoncĂ© Ă  rien. Son socialisme, celui de ses premiers Ă©lans, il le fera vivre Ă  travers une revue qui se confond avec la vie et l’Ɠuvre de l’écrivain qu’il devient Les Cahiers de la Quinzaine. Quelques citations de Charles Peguy – Quarante ans est un Ăąge terrible. Car c’est l’ñge oĂč nous devenons ce que nous sommes. – Il y a des larmes d’amour qui dureront plus longtemps que les Ă©toiles du ciel. – Aimer c’est donner raison Ă  l’ĂȘtre aimĂ© qui a tort. – On reconnaĂźt les honnĂȘtes gens Ă  ce qu’ils font leurs mauvais coups avec plus de maladresse que les autres. – Le vieillissement est essentiellement une opĂ©ration de mĂ©moire. Or c’est la mĂ©moire qui fait toute la profondeur de l’homme. – Une Ăąme morte est une Ăąme complĂštement habituĂ©e. – Je me permets quelquefois de rĂ©flĂ©chir entre mes repas, ce qui me fait perdre Ă©normĂ©ment de temps.

charles peguy la mort n est rien